Les cicatrices économiques à long terme des suppressions d’emplois

Au cours des deux premiers mois de la récession du COVID-19, environ 22 millions d’Américains – environ 13 % de la main-d’œuvre américaine – ont perdu leur emploi. L’impact initial sur l’emploi a été le plus important pour les travailleurs noirs, latinos, féminins et moins instruits. Alors que l’économie américaine a rapidement récupéré bon nombre des emplois initialement perdus, certains de ces travailleurs ont été déplacés d’emplois et d’employeurs avec lesquels ils avaient une expérience significative, et les effets négatifs de ces déplacements peuvent être importants et persistants.

Dans notre nouveau rapport, nous utilisons les données de l’étude par panel sur la dynamique des revenus (PSID) pour comprendre les effets sur les revenus des déplacements d’emplois qui se sont produits au cours des 30 dernières années aux États-Unis. Nous considérons qu’un travailleur est déplacé s’il perd involontairement un emploi à temps plein qu’il a occupé pendant au moins deux ans. À l’aide d’un modèle à effets fixes d’étude d’événements, nous comparons les gains des travailleurs déplacés et non déplacés pendant les cinq années précédant un déplacement et les dix années qui le suivent.

Un choc négatif brutal et durable

La figure 1 montre les effets d’un déplacement d’emploi sur le logarithme des gains annuels pour chaque année par rapport au déplacement. Il y a plusieurs points clés à retenir de la figure. Premièrement, il y a un important effet négatif initial d’un déplacement sur les gains. Nous estimons une baisse de 57 % des revenus annuels dans l’année qui suit immédiatement le déplacement, ce qui est conforme aux études antérieures sur le déplacement. Deuxièmement, même si les gains rebondissent dans une certaine mesure au cours des années suivantes, l’effet négatif persiste. Même dix ans après un déplacement, les travailleurs gagnent environ 25 % de moins que leurs pairs non déplacés.[1] En termes simples, la figure 1 contient un message clair : les travailleurs qui subissent un déplacement d’emploi subissent des pertes de revenus immédiates et importantes, qui persistent même une décennie plus tard.

Figure 1 : Effet du déplacement d'emplois sur le logarithme des gains annuels

Qu’est-ce qui se cache derrière les importantes pertes de revenus ? Salaires vs heures travaillées

Pour comprendre le mécanisme à l’origine de l’effet négatif durable des déplacements sur les revenus, nous examinons l’impact des déplacements sur les salaires horaires et les heures annuelles travaillées. Bien que nous constations que les travailleurs travaillent beaucoup moins d’heures au cours des deux premières années suivant un déplacement d’emploi, l’impact à plus long terme est entraîné par une baisse des salaires horaires. La figure 2 trace l’effet d’un déplacement d’emploi sur le logarithme des salaires horaires par année relative.

Figure 2 : Effet du déplacement d'emploi sur le logarithme des salaires horaires

Immédiatement après un déplacement, les salaires horaires baissent de près de 15 % et ne se rétablissent jamais complètement. Dix ans après un déplacement, les travailleurs connaissent toujours une baisse de près de 15 % de leur salaire horaire par rapport à leurs pairs non déplacés. Cela donne à penser que l’effet persistant d’un déplacement d’emploi sur les gains annuels est attribuable à une baisse des salaires et non à une baisse de la probabilité d’être employé ou du nombre d’heures travaillées.

Protégez les travailleurs avec l’assurance-chômage et les crédits d’impôt sur le revenu gagné

Ces résultats suggèrent que les déplacements nuisent aux travailleurs à court et à long terme. La recherche suggère que, parmi les programmes de filet de sécurité, l’assurance-chômage (UI) est le plus efficace pour atténuer les pertes de revenus des travailleurs déplacés, bien qu’elle ne protège souvent pas les travailleurs les plus vulnérables. Les pertes d’emplois massives qui ont accompagné la récession du COVID-19 se sont heurtées à une assurance-chômage (AC) améliorée, ce qui a sans aucun doute atténué certains des effets catastrophiques initiaux du déplacement d’emplois. Cependant, on ne sait pas encore quels seront les effets à long terme sur ceux qui ont été déplacés par la pandémie de COVID-19. Les recherches suggèrent que des politiques telles qu’un crédit d’impôt sur le revenu élargi (EITC) pourraient également aider les travailleurs déplacés.

Dans un blog séparé, nous examinons si la probabilité de subir un déplacement d’emploi et ses effets sur les revenus varient en fonction de la race, du niveau d’éducation et du revenu parental d’un travailleur.

Notes de bas de page

[1] Notez qu’avant le déplacement, il n’y a pas de différences statistiquement significatives dans les revenus entre les travailleurs déplacés et non déplacés, ce qui suggère que les effets sur les revenus après le déplacement sont dus à l’expérience de la perte d’un emploi que l’on avait pendant une période prolongée – et perdre la valeur de toutes les compétences spécifiques que l’on avait acquises dans cet emploi au fil du temps – plutôt que parce que les travailleurs qui seront déplacés suivent une trajectoire de revenus fondamentalement différente.


Kristin Butcher est vice-présidente et directrice de la recherche microéconomique à la Federal Reserve Bank de Chicago. Les opinions exprimées sont celles des auteurs et ne reflètent pas nécessairement représentent les points de vue de la Federal Reserve Bank de Chicago, du Conseil des gouverneurs de la Federal Reserve System, ou son personnel.

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