Biden peut-il éviter une falaise d’assurance maladie?

Préserver et étendre la couverture d’assurance maladie pour les Américains a été l’un des principaux objectifs de l’administration Biden. Grâce à des initiatives législatives et exécutives, il a réussi à renforcer les programmes fédéraux orientés vers cet objectif. Mais ce succès risque d’être de courte durée. Une falaise d’assurance maladie se profile qui menace d’éroder les gains de couverture réalisés au cours des deux premières années de Biden. Alors que 2022 décline, la question reste ouverte de savoir si l’administration Biden contournera cette falaise ou s’effondrera dessus.

La falaise émane en partie des délais attachés aux efforts de Biden pour revigorer et étendre les échanges d’assurance maladie de la loi sur les soins abordables (ACA). Ces échanges, ou marchés, permettent aux particuliers d’acheter une couverture auprès des compagnies d’assurance participantes. L’ACA a autorisé des subventions fédérales pour les acheteurs dont les revenus se situent entre 100 % et 400 % du seuil de pauvreté (c’est-à-dire des revenus compris entre 26 500 $ et 106 000 $ pour une famille de quatre personnes en 2021). Le succès de Biden dans l’obtention de l’adoption de l’American Rescue Plan Act en 2021 a considérablement amélioré les subventions de change. Approuvé sur un vote strict de la ligne du parti, le plan de sauvetage augmente le soutien financier aux personnes dans la cohorte de 100% à 400% de pauvreté de l’ACA. Pour la première fois, il subventionne également les personnes dont les revenus dépassent le seuil de 400 %. La subvention pour ce groupe plus aisé entre en jeu lorsque le coût des primes pour un plan d’échange de référence dépasse 8,5 % du revenu du ménage du demandeur. On estime que 2,4 millions de personnes dont les revenus se situent entre 400 % et 600 % du seuil de pauvreté bénéficieraient de cette disposition lorsqu’elles solliciteraient une couverture d’assurance.

La loi sur le plan de sauvetage et les initiatives exécutives de Biden (par exemple, des périodes d’inscription considérablement étendues) ont déclenché une augmentation des inscriptions aux échanges, qui a inversé quatre années de baisse sous la présidence Trump. Les souscriptions à l’assurance échange pour 2021 sont passées à plus de 12 millions, soit une augmentation de 5% par rapport à l’année précédente. Les augmentations se sont poursuivies en 2022 avec plus de 14,5 millions d’inscriptions. Mais le temps presse sur cette progression des inscriptions puisque les subventions du plan de sauvetage américain ne s’appliquent qu’en 2021 et 2022. Le Congressional Budget Office estime que le non-renouvellement des subventions entraînera une baisse des inscriptions aux échanges de trois millions, réduisant les inscriptions à ce qu’elles étaient. ont été la dernière année de l’administration Trump.

Les efforts de l’administration Biden pour éviter cette falaise d’inscription se concentrent sur l’adoption de la législation Build Back Better. La version expansive originale de cette législation a échoué fin 2021 lorsque, face à l’opposition républicaine unifiée et à deux sénateurs démocrates, Joe Manchin de Virginie-Occidentale et Kristen Sinema d’Arizona, ont refusé de la soutenir. Ce revers a incité l’administration Biden à demander l’approbation d’une version «maigre» moins chère de Build Back Better. Cette version est susceptible d’inclure une continuation des subventions de change renforcées. La législation a une chance de gagner le soutien du sénateur Manchin puisque son opposition au projet de loi original ne découlait pas de ses dispositions sur les soins de santé. Pourtant, Manchin a indiqué que son soutien à une telle mesure repose sur le fait qu’elle inclut également des réformes fiscales et n’augmente pas le déficit fédéral. Les perspectives d’une législation étendant les subventions de change sont donc, au mieux, incertaines.

Comme si cette falaise d’inscription n’était pas suffisamment intimidante pour l’administration Biden, la fin imminente de l’urgence de santé publique inspirée par Covid se profile également. La législation renforçant Medicaid en réponse à la pandémie a forgé cette caractéristique de la falaise. Medicaid est le plus grand programme de subventions fédérales aux États, qui subventionne la couverture santé des Américains à faible revenu. La contribution fédérale couvre généralement de 50% à environ 75% des dépenses de l’État (le taux de contrepartie) pour le programme, les États moins riches bénéficiant de subventions fédérales proportionnellement plus importantes. Le Families First Coronavirus Response Act de mars 2020 a autorisé une augmentation de 6,2 points de pourcentage du taux de correspondance de Medicaid avec les États à partir du 1er janvier 2020 et jusqu’à l’expiration de l’urgence de santé publique déclarée par le gouvernement fédéral. Pour recevoir cette subvention améliorée, un État devait s’abstenir de rendre les critères d’éligibilité à Medicaid plus stricts ou de désinscrire les bénéficiaires actuels. Cela signifiait que les bénéficiaires dont les revenus dépassaient par la suite le niveau d’éligibilité à Medicaid resteraient inscrits pendant toute la durée de l’urgence de santé publique. Par la suite, les inscriptions à Medicaid ont grimpé de 25 %, passant de 64 millions en février 2020 juste avant la pandémie à un niveau record de 80 millions à la mi-2022.

Cependant, une fois que le président aura mis fin à l’urgence de santé publique, les États perdront la subvention fédérale améliorée et devront procéder en temps opportun à des révisions d’éligibilité basées sur le revenu pour les inscrits ou faire face à des sanctions fiscales fédérales. Ce processus menace d’alimenter une baisse de la couverture de l’assurance maladie. De nombreux bénéficiaires de Medicaid auraient des revenus trop élevés pour être éligibles au programme plus longtemps et ne réussiraient pas à passer en douceur aux bourses d’assurance de l’ACA. Beaucoup d’autres continueraient à répondre aux critères d’éligibilité de Medicaid mais perdraient leur couverture pour non-respect des exigences administratives souvent lourdes pour le renouvellement.

Les limites de la capacité de l’État à traiter les demandes de renouvellement aggravent les problèmes. L’Association nationale des directeurs de Medicaid s’est dite préoccupée par le fait que de nombreux États manquent d’un nombre suffisant de personnel expérimenté et bien formé pour s’acquitter efficacement de la fonction de renouvellement en temps opportun. Alors que certains États envisagent de faire face à leurs capacités administratives limitées en sous-traitant la fonction de renouvellement, il est loin d’être clair si ces entités privées sont plus équipées pour accomplir cette tâche. De plus, certains États, désireux de réduire les coûts de Medicaid, peuvent inciter les entrepreneurs de manière à réduire la participation des candidats qui répondent aux critères d’éligibilité du programme. Ces facteurs ont incité la Kaiser Family Foundation à prévoir qu’au moins 5,3 millions et peut-être jusqu’à 14,2 millions d’inscrits perdront la couverture Medicaid lorsque l’urgence de santé publique prendra fin.

L’administration Biden a agi pour réduire la menace d’une baisse précipitée de la couverture d’assurance. Alors que l’administration Trump avait donné aux États six mois pour achever le processus de redétermination, l’administration Biden s’est engagée à leur donner un préavis de 60 jours de la fin de l’urgence sanitaire et 14 mois supplémentaires pour procéder à de nouvelles déterminations d’éligibilité. La Maison Blanche a également décidé d’établir une période spéciale d’inscription ouverte toute l’année sur les échanges ACA pour faire passer ceux qui ne sont plus éligibles à Medicaid à cette couverture. L’administration Biden a également fourni un flux constant de conseils encourageant les États à adopter des pratiques de renouvellement adaptées aux clients. Il a menacé de pénaliser financièrement les États qui adoptent des procédures de renouvellement lourdes qui contournent la loi Medicaid (par exemple, en exigeant des entretiens en personne pour les candidats au renouvellement). Une question clé pour l’administration Biden est de savoir quand mettre fin à l’urgence de santé publique. De nombreux prestataires de soins de santé et défenseurs des bénéficiaires à faible revenu ont exhorté Biden à prolonger l’urgence au moins jusqu’en octobre. Il semble probable que son administration accédera non seulement à cette demande, mais reportera cette décision politiquement douloureuse jusqu’après les élections.

Dans l’ensemble, l’incertitude entoure la mesure dans laquelle l’administration Biden sera en mesure d’éviter la falaise de l’assurance maladie. Dans le cas des bourses de l’ACA, cette incertitude découle d’une législatif défi. Biden obtiendra-t-il le passage d’une version de Build Back Better qui prolonge les subventions du plan de sauvetage américain pour ceux qui recherchent une couverture ? Dans le cas de l’expansion de Medicaid inspirée par la pandémie, l’incertitude découle d’un la mise en oeuvre défi où les États détiennent les cartes maîtresses. Quelles que soient les mesures prises par les responsables fédéraux pour atténuer la menace pour la couverture d’assurance associée à la fin de l’urgence de santé publique, ils doivent compter sur les États pour les mettre en œuvre. Étant donné que les États varient considérablement dans leur capacité administrative et leur engagement à préserver les inscriptions à Medicaid, éviter cette falaise de couverture est loin d’être assuré.

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