L’innovation sociale pour une transition juste vers la durabilité

Comment faire face à l’urgence climatique et écologique tout en maintenant et en améliorant le bien-être ? Le travail de CUSP montre comment les deux éléments ne peuvent pas être séparés, mais il nécessite également une innovation sociale qui rassemble des preuves diverses, brisant les silos de connaissances qui entravent le développement de politiques et de pratiques.

Il s’agit d’un thème central de la Conférence internationale de recherche sur l’innovation sociale (ISIRC) avec un volet sur l’innovation sociale à une époque d’urgence climatique et de biodiversité, invitant actuellement des résumés d’articles et des idées pour des panels du monde entier.

L’innovation sociale et le développement de pratiques, d’approches et d’institutions nouvelles sont désespérément nécessaires. Ceci est accentué par la pandémie et les appels généralisés à reconstruire mieux et reconstruire plus juste. Des questions demeurent sur les meilleurs processus pour encourager les changements requis.

L’un des éléments clés de tels processus est de s’assurer que la transition est socialement et économiquement juste : nous devons nous assurer que certains endroits ne sont pas indûment défavorisés. Cela nécessite l’identification des endroits les plus exposés aux conséquences négatives, qu’il s’agisse de communautés, de régions ou de nations ; nous devons également nous assurer de travailler avec les industries qui sont particulièrement touchées. La transition vers des économies à faibles émissions de carbone est une opportunité de créer du « travail décent », c’est-à-dire des sources d’emploi plus stables et plus saines ; et CUSP a travaillé sur la question dans un certain nombre de projets au cours des cinq dernières années.

L’impact négatif de la décarbonation est susceptible d’être plus important dans les communautés construites sur des industries à forte intensité de carbone en général, c’est clair. Mais nous devons prêter une attention égale à l’impact que des coûts plus élevés peuvent avoir sur toutes les communautés structurellement marginalisées et défavorisées. Si les dispositifs de compensation pourraient être un outil de transition réactif pour éviter les retombées, le processus de décarbonation pourrait tout autant être un tremplin pour remédier consciemment aux désavantages historiques et une forme de politique réparatrice.

Il existe de solides justifications morales pour assurer une transition socialement et économiquement juste. Les approches du net zéro qui n’incluent pas ces considérations sont susceptibles de rencontrer une forte résistance, en particulier si certains endroits ou communautés estiment qu’ils sont touchés de manière disproportionnée. Il y a des leçons à tirer de la résistance à la politique climatique aux USA, au Brésil et en France lorsqu’elle est perçue comme une forme de fiscalité régressive et d’accroissement des inégalités.

Et bien sûr, une transition juste ne peut pas être une entreprise descendante, mais nécessite des initiatives et des actions au niveau communautaire. Le changement technologique est sans aucun doute nécessaire, mais les innovations locales doivent également être encouragées : que peut-on faire pour requalifier les personnes dans les emplois menacés ? Que peut-on faire pour soutenir le développement de nouvelles industries et la croissance des secteurs qui utilisent moins de ressources tout en maximisant le bien-être ? Les travaux de CUSP montrent comment la prospérité durable doit être redéfinie comme un bien vivre dans les limites planétaires.

Désormais, l’innovation bottom-up a besoin de ressources particulières, avec la possibilité de développer des stratégies de réinvestissement localisées en utilisant les fonds générés par les taxes carbone par exemple. La transition devra être basée sur un large éventail de modèles commerciaux qui peuvent garantir que les désavantages sont traités tout en atteignant les aspirations de zéro net. Des modèles commerciaux innovants qui dépassent le seul objectif de la maximisation des profits seront au cœur de cette vision. L’abondante littérature sur les modèles commerciaux durables montre qu’il existe des opportunités pour remplacer les combustibles fossiles par des énergies renouvelables, maximiser l’efficacité matérielle et énergétique et l’économie circulaire. Une attention particulière peut être accordée aux processus au sein des entreprises et, plus important encore, au sein de leurs chaînes d’approvisionnement.

L’innovation pour une transition juste doit également prendre en compte les modalités de gouvernance plus larges au-delà de l’entreprise individuelle. L’innovation dans la gouvernance, à son tour, doit garantir que la prise de décision permet une juste allocation des ressources pour atteindre ceux qui en ont le plus besoin et ceux qui sont les plus touchés par la décarbonisation. Cela doit être fait de manière à susciter le consentement et à susciter l’enthousiasme. Des questions concernant le développement de stratégies demeurent : nous devons nous assurer d’inclure les décideurs politiques locaux, les élus, les syndicats, les associations professionnelles et les investisseurs ; et nous devrions toujours viser à inclure les plus marginalisés en particulier.

Le soutien à l’innovation est généralement axé sur des objectifs économiques; le rôle de l’innovation dans la contribution aux objectifs sociétaux a cependant aussi une longue tradition. Et cela n’est devenu plus important que récemment, par exemple grâce à un financement basé sur une « mission », qui comprenait des programmes ciblant l’agenda vert ainsi que des questions telles que le vieillissement de la société.

« L’engagement des utilisateurs » dans la recherche et l’innovation, qui s’étend aux communautés, y compris les communautés marginalisées, est fondamental pour le fonctionnement efficace des systèmes d’innovation. Il est essentiel pour que les innovations prennent racine sur le terrain et pour soutenir leur diffusion et leur adoption. Il est également nécessaire de comprendre l’écosystème de soutien plus large qui comprend les fournisseurs de financement, le soutien aux entreprises, les environnements politiques favorables et les communautés de pratique en général.

Partout dans le monde, des idées et des innovations émergent, avec le défi non seulement d’étendre ces solutions créatives, mais aussi de comprendre les facteurs qui les entravent et les conséquences imprévues de ces innovations. Mais surtout, nous devons établir fermement les multiples moyens qui aident à encourager d’autres innovations pour une transition juste et donner la parole à tous. Ce seront les conversations développées lors de la conférence de l’ISIRC.

À propos de la Conférence sur l’innovation sociale

Pour plus de détails sur la conférence de l’ISIRC et le processus de soumission des résumés, veuillez vous rendre sur www.isirc2021milano.com et le flux spécifique sur Durabilité et innovation sociale à l’heure de l’urgence climatique et de la biodiversité. Chaires : Fergus Lyon (Middlesex University/CUSP), Irene Garnelo-Gomez (Université de Reading), Rafael Ziegler (HEC Montréal)

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