Introduction
L’UE est depuis longtemps un fervent partisan des marchés ouverts et du système commercial mondial. Il semble donc difficile de croire qu’elle ait introduit le concept de réduction des risques liés à la Chine avant même l’administration américaine.
Pour mieux comprendre comment nous en sommes arrivés là, il est nécessaire de contextualiser la situation de l’UE et ses relations avec la Chine.
L'UE a vu dans l'entrée de la Chine dans l'OMC une occasion d'élargir le système commercial mondial tout en continuant à libéraliser le commerce et l'investissement. C'était l'un des outils de la politique d'engagement plus générale de l'Occident envers la Chine. Sur le plan économique, l'engagement s'est étendu aux entreprises chinoises, mais son champ d'action a été plus restreint que prévu initialement. Les investissements directs étrangers dans le secteur manufacturier n'ont été accueillis favorablement que dans les secteurs que la Chine a décidé d'ouvrir et, dans la plupart des cas, en échange d'un transfert de technologie. De nombreux secteurs, notamment dans les services, sont restés fermés et les entreprises publiques n'ont pas été privatisées ni les subventions supprimées.
Essentiellement, la Chine n’est jamais devenue une économie de marché et a continué à utiliser la politique industrielle pour gravir les échelons, tout en accumulant d’importants excédents commerciaux, par le biais d’une consommation réprimée et d’un accès limité au marché à la concurrence étrangère.
Cette situation ne s’est pas améliorée depuis l’arrivée au pouvoir du président Xi en 2013. Au contraire, les entreprises chinoises ont acquis une taille suffisante pour être compétitives à l’étranger, aidées par de grandes acquisitions à l’étranger, mais sans encore ouvrir leur propre marché. Le résultat d’une situation de plus en plus défavorable, du point de vue de l’UE, a conduit à un virage copernicien dans sa position envers la Chine en mars 2019. Tout en reconnaissant que la coopération était nécessaire dans certains domaines – notamment le climat – la concurrence mais aussi la rivalité systémique ont été introduites comme des traits clés des relations UE-Chine.
Depuis 2019, deux chocs majeurs ont conduit à la détérioration des relations entre l'UE et la Chine. Le premier a été la pandémie de COVID-19, qui a vu la Chine se montrer peu coopérative, mais aussi la prise de conscience de l'énorme dépendance que l'Europe avait développée envers la Chine pour des produits indispensables en temps de pandémie. Le deuxième a été l'invasion de l'Ukraine par la Russie et le soutien de la Chine à la Russie, contre les intérêts de l'UE, ce qui a surpris beaucoup de monde.
La pandémie et l’invasion de l’Ukraine ont toutes deux amené l’Europe à prendre pleinement conscience de la nécessité de développer son autonomie stratégique et sa sécurité économique, ce qui implique de réduire ses dépendances critiques à l’égard de la Chine, en particulier lorsque la sécurité économique et nationale est en jeu. La deuxième prise de conscience de l’UE concernant ses dépendances stratégiques, à savoir à l’égard du gaz russe, n’a fait qu’accélérer sa recherche d’une solution politique à une telle situation.
Ce faisant, une nouvelle dépendance critique – et encore une fois vis-à-vis de la Chine – est devenue évidente, à savoir la part considérable des énergies renouvelables importées dans l’UE en provenance de Chine.