Le russe Gazprom amène un hiver précoce en Europe

Une station-service Gazprom à Moscou.


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Kirill Kudryavtsev/Agence France-Presse/Getty Images

L’hiver commence tôt en Europe cette année, alors que la société énergétique russe Gazprom a annoncé vendredi qu’elle fermait indéfiniment un pipeline de gaz naturel clé. Si « indéfiniment » est aussi long que beaucoup le craignent, cette décision brouillera les plans énergétiques de l’Europe pour ce qui était déjà destiné à être une saison froide rude.

Gazprom ferme le robinet du Nord Stream 1, le principal conduit du gaz russe vers l’Allemagne et le reste de l’Europe occidentale. Le pipeline ne fonctionnait déjà qu’à 20 % de sa capacité et devait subir un arrêt de trois jours pour maintenance. La société russe dit maintenant qu’elle doit réparer un autre défaut, et elle ne peut pas ou ne veut pas dire combien de temps cela prendra.

Il est difficile de prendre cette affirmation au pied de la lettre. D’autres arrêts et réductions de capacité de Nord Stream 1 cet été ont eu une teinte politique. Peut-être que le Kremlin punit maintenant l’Allemagne et d’autres alliés pour le plan du G-7 annoncé vendredi pour plafonner le prix que les pays paient pour les exportations de pétrole russe.

Ou Vladimir Poutine pourrait vouloir dissuader l’Europe de soutenir une offensive ukrainienne en cours pour repousser ses forces d’invasion russes de certaines parties du sud de l’Ukraine. Ou il peut simplement espérer fomenter des troubles politiques pour les gouvernements occidentaux confrontés à l’inflation et aux crises énergétiques alors que le temps se refroidit.

Le problème de l’Europe est que, malgré une guerre de six mois en Ukraine, elle reste accro au gaz russe. Des pays comme l’Italie et la France ont fait des progrès dans la recherche de fournisseurs alternatifs comme l’Algérie, mais l’infrastructure physique est un point faible. L’Allemagne ne dispose pas des terminaux de gaz naturel liquéfié (GNL) dont elle aurait besoin pour importer du gaz en grandes quantités de n’importe où autre que la Russie et ne terminera pas trois nouveaux terminaux avant des années.

En conséquence, le plan de l’Europe pour se sevrer du gaz russe s’est appuyé sur . . . Gaz russe. L’Allemagne s’est empressée de stocker autant de gaz de Nord Stream 1 que possible pendant les mois chauds, un processus ralenti par les réductions de capacité de Gazprom. Pendant ce temps, M. Poutine a profité de la hausse des prix mondiaux du gaz, qui a augmenté ses revenus du gaz que l’Europe veut, comme Saint-Augustin, cesser d’acheter, mais pas encore.

Un arrêt de Nord Stream 1 facturé comme indéfini marquera un changement même si Gazprom redémarre bientôt les expéditions de gaz. Le message à l’Europe est qu’il est peut-être temps de commencer à mettre en œuvre un plan énergétique B que le continent n’a pas, y compris le rationnement du gaz ou l’exploitation du gaz stocké des mois avant la date prévue.

Cela fera une saison misérable pour les Européens et leurs politiciens, avec des conséquences inimaginables. Mais c’est aussi un jeu dangereux pour M. Poutine. La dépendance de l’Europe au gaz russe s’est construite sur la fiction que le Kremlin traiterait toujours l’énergie comme une affaire commerciale. Les Européens voient maintenant à quel point c’était faux, et on peut se demander ce qui leur a pris si longtemps.

Mais c’est une erreur qu’il est peu probable qu’ils commettent à nouveau, quelle que soit la fin de la guerre en Ukraine. D’autres clients potentiels du gaz russe, comme la Chine, observent également ce chantage énergétique. L’Europe paie sa dépendance énergétique vis-à-vis de la Russie. M. Poutine pourrait payer plus tard pour l’exploiter.

Rapport éditorial du Journal: Paul Gigot interviewe Bjorn Lomborg sur les objectifs climatiques de Biden. Image : MANDEL NGAN/AFP via Getty Images

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