Liz Truss n’est peut-être que la première ministre dont l’Amérique a besoin

Des frissons de désapprobation ont secoué le département d’État l’année dernière lorsque la secrétaire d’État britannique aux Affaires étrangères Liz Truss a rencontré pour la première fois le secrétaire d’État Antony Blinken. Elle était « franche » et « affirmée » et a adopté des « positions maximalistes », ont affirmé des sources américaines anonymes. L’horreur : un fonctionnaire britannique aussi franc qu’un Américain !

En tant que Premier ministre, une Mme Truss affirmée pourrait être un multiplicateur de force pour les États-Unis Boris Johnson, dans ses adieux au Parlement, a conseillé à ses collègues de « rester proches des Américains ». Ces mots sont étranges aux oreilles américaines car nous les entendons rarement, même de la part de nos amis les plus proches. Mais M. Johnson le pensait, et il ne fait aucun doute que Mme Truss est d’accord. Dans les crises et les conflits à venir, sa récompense pour ses inclinations pro-américaines sera la critique selon laquelle, comme Tony Blair pendant la guerre d’Irak après le 11 septembre, elle est le «caniche» de Washington. Les critiques ne comprennent pas que Washington apprécie les conseils sans fard et les critiques franches de Londres comme preuve de la force de l’alliance. D’ailleurs, je n’ai jamais rencontré de caniche britannique.

Pour l’Amérique, bilatéralement et mondialement, la transition de M. Johnson à Mme Truss se fera probablement en douceur. À une époque où les dirigeants américains sont hésitants, voire complètement dans l’erreur, comme dans la décision tragique de se retirer d’Afghanistan, la détermination britannique est essentielle pour soutenir et faire progresser les intérêts occidentaux.

M. Johnson lègue à Mme Truss le travail essentiellement achevé de libérer le Royaume-Uni de l’Union européenne, lui permettant ainsi de se concentrer sur de nouvelles priorités. En tant qu’ancienne « restante », Mme Truss est, ironiquement, bien adaptée à l’impératif post-Brexit de réussir la nouvelle réalité internationale britannique. Cela nécessite d’abandonner une orientation eurocentrique en économie, s’efforçant plutôt d’étendre les échanges et le commerce britanniques dans le monde entier, et en politique de faire progresser les intérêts britanniques mondiaux. Alors qu’elle était secrétaire au commerce de M. Johnson, à la recherche d’accords bilatéraux avec les États-Unis et d’autres pays, l’attention de Mme Truss après le Brexit a été marquée par la détermination et la persévérance. La direction philosophique de sa politique semble claire.

La guerre en Ukraine a prouvé que lorsqu’il s’agit de défendre la paix et la sécurité continentales, le Royaume-Uni peut être un meilleur « Européen » en dehors de l’UE que des membres clés de l’UE comme la France et l’Allemagne. Alors que le président Biden a bégayé en définissant des objectifs clairs pour l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord et en fournissant une assistance militaire à l’Ukraine, le gouvernement de M. Johnson n’a jamais faibli. Mme Truss a parlé de faire en sorte que Vladimir Poutine « perde en Ukraine » et subisse une « défaite stratégique ». En revanche, M. Biden et ses conseillers plus timides semblent être entraînés par le Congrès, des responsables plus avancés et des événements sur le terrain. Surtout si Mme Truss maintient le secrétaire à la Défense Ben Wallace en place, Londres restera probablement résolue même si Washington continue de faiblir.

Les mouvements fortuits de la Finlande et de la Suède pour rejoindre l’OTAN faciliteront le maintien de la prise de décision en matière de défense et de sécurité au sein de l’alliance et résisteront à la pression constante de la France pour étendre l’implication de l’UE dans ces domaines. Mme Truss n’aura aucune difficulté à insister sur le fait que l’OTAN est l’épicentre des débats politico-militaires occidentaux, plutôt que de se livrer à l’idée fantaisiste que l’UE peut ou devrait l’être.

Parce que Mme Truss est libérée de l’esprit de clocher de l’UE, elle semble prête à affronter les aspirations de la Chine à l’indo-pacifique puis à l’hégémonie mondiale. Au cours de la campagne à la direction des conservateurs qui vient de s’achever, elle aurait été prête à rouvrir la stratégie de sécurité nationale de la Grande-Bretagne pour déclarer la Chine, comme la Russie, une « menace aiguë », plutôt qu’un simple concurrent stratégique. Comme en Amérique, les résistants bureaucratiques dans des départements clés, tels que le Trésor et le ministère des Affaires étrangères, résistent même à reconnaître la lutte avec la Chine, mais Mme Truss ne se fait aucune illusion. Son leadership en tant que ministre des Affaires étrangères dans l’établissement du partenariat Aukus pour construire des sous-marins nucléaires pour l’Australie le prouve. Pendant la campagne, le soutien de Mme Truss des sino- et euro-réalistes comme l’ancien chef du parti Iain Duncan Smith et Sir Bill Cash indique qu’elle est engagée sur la question chinoise.

La menace nucléaire iranienne reste également un défi pour la Grande-Bretagne et l’Amérique. En tant que partie à l’accord nucléaire de 2015, Londres a un rôle clé, et il y a des signes que Mme Truss est plus sceptique quant à l’échec de l’accord que les gouvernements britanniques précédents. Ses partisans vocaux le sont certainement. Ne faisant plus partie du groupe de négociation « UE-3 » avec la France et l’Allemagne, la Grande-Bretagne peut jouer un rôle véritablement indépendant. Si Mme Truss profitait de son premier appel téléphonique en tant que Premier ministre avec M. Biden pour l’exhorter à abandonner l’accord et souligner que toutes les options sont sur la table, son gouvernement serait bien lancé.

La sélection de Margaret Thatcher en 1979 au poste de Premier ministre préfigurait l’élection de Ronald Reagan à la présidence. On ne peut qu’espérer une reprise, et le plus tôt sera le mieux.

M. Bolton est l’auteur de « The Room Where It Happened: A White House Memoir ». Il a été conseiller du président pour la sécurité nationale en 2018-2019 et ambassadeur aux Nations Unies en 2005-2006.

Rapport éditorial du Journal : Le meilleur et le pire de la semaine de Kyle Peterson, Allysia Finley, Mene Ukueberuwa et Dan Henninger. Images : AP/US Navy/AFP/Getty Images Composé : Mark Kelly

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