Surveillance de l’exposition des banques aux non-banques : l’importance du réseau d’interconnexions

Le premier article de cette série traitait de l’exposition potentielle des banques au secteur des fonds ouverts, en raison des points communs dans les actifs détenus qui exposent les banques à des pertes de bilan en cas de vente d’actifs par ces fonds. Dans cet article, nous résumons les conclusions présentées dans un de nos articles récents, dans lequel nous élargissons l’analyse pour prendre en compte un large éventail de segments d’institutions financières non bancaires (IFNB). Nous dévoilons un aperçu de surveillance innovant : le réseau d’interconnexions entre les segments NBFI et les questions bancaires. Par exemple, certaines institutions non bancaires peuvent ne pas avoir un chevauchement d’actifs significatif avec les banques, mais leurs ventes en catastrophe pourraient néanmoins représenter une vulnérabilité pour les banques car leurs actifs se chevauchent étroitement avec d’autres institutions financières non bancaires auxquelles les banques sont fortement exposées.

Externalités de réseau dans les chocs de vente incendiaire

Nous élargissons l’analyse dans la première partie de cette série pour considérer simultanément douze types distincts d’institutions non bancaires. L’élargissement de la section transversale des types de NBFI nous permet de considérer la complexité des interconnexions dans l’écosystème financier, où les banques et les non-banques opèrent sur plusieurs marchés. À son tour, cette considération nous permet de dévoiler l’existence d’externalités de réseau importantes dans la transmission des chocs de braderie.

À titre d’exemple d’effets de réseau, supposons que nous nous intéressons au suivi des vulnérabilités des banques par rapport à un secteur NBFI donné S. les entités pourraient être – en termes d’interconnexions de détention d’actifs – au sein du réseau diversifié de tous les types d’IFNB. En effet, les entités de S peuvent détenir un portefeuille d’actifs bien diversifié, ce qui implique un chevauchement important des actifs avec de nombreux autres segments de marché des IFNB. Ce large chevauchement d’actifs implique une probabilité plus élevée de connaître des difficultés si l’un des autres segments NBFI initie des ventes de feu, ce qui signifie à son tour une probabilité plus élevée que les entités de S transmettent des chocs aux banques. De plus, si elles sont centrales dans le réseau NBFI, les ventes de feu des entités de S pourraient elles-mêmes imposer une détresse à un large éventail d’autres NBFI. En somme, le secteur S pourrait être une source potentiellement importante de vulnérabilités bancaires en raison de sa centralité dans le réseau NBFI, même si, sur une base autonome, leur impact de vente de feu sur les banques était limité.

Analyse des réseaux NBFI

Nous recueillons des informations sur la composition des actifs des segments NBFI à l’aide des comptes financiers trimestriels des États-Unis (Z.1) publiés par le Federal Reserve Board, communément appelés flux de fonds. Étant donné que les données sur les flux de fonds ne sont présentées que sous forme d’agrégat pour un type de secteur donné, nous échangeons la granularité des données avec l’étendue de la couverture lors de l’examen du réseau. Avec des données agrégées, alors que nous perdons des détails plus fins, nous acquérons la capacité de découvrir des mécanismes (complexes) de transmission et d’amplification et de générer des informations de surveillance innovantes. Le tableau ci-dessous présente la matrice des participations croisées par type d’institution et d’actif à partir du flux de fonds 2021 : 4.

Matrice des participations croisées à partir du flux de fonds 2021:Q4

Montants en milliards de dollars américains Équité MBS de l’agence Prêt banquaire Papier du marché libre Obligation de société Obligation du gouvernement Muni Bond Espèces Total
Banques 54 3 883 12 631 0 888 1 641 643 4 221 23 962
Assureurs IARD 643 136 28 4 702 188 289 142 2 133
Assureurs-vie 133 231 808 23 3 266 175 222 141 4 998
Les fonds du marché monétaire 0 410 0 226 7 1 815 111 2 640 5 208
Fonds communs de placement (actions) 14 270 0 0 26 0 0 0 190 14 486
Fonds communs de placement (obligations) 0 492 131 dix 2 485 1 447 900 73 5 537
Fonds communs de placement (hybrides) 1 264 49 13 3 250 145 90 24 1 840
Des fonds négociés en bourse 5 804 0 0 0 800 331 83 39 7 057
FPI hypothécaires 0 168 0 0 12 0 0 17 197
Courtiers-concessionnaires 234 54 0 16 15 99 13 1 396 1 827
Sociétés de financement 0 0 1 026 0 99 0 0 57 1 182
Fonds spéculatifs 1 140 8 181 0 474 165 15 227 2 210
Les fonds de pension 4 932 321 23 44 1 312 695 0 666 7 993
Total 28 475 5 753 14 840 354 10 308 6 701 2 367 9 832
Source : Comptes financiers des États-Unis.
Remarque : Données ajustées pour ventiler les fonds communs de placement en trois sous-types.

Les données montrent des variations considérables en termes de taille relative et de portefeuille d’actifs détenus dans l’ensemble des types d’institutions, ce qui suggère une hétérogénéité en termes d’effets de braderie au premier tour, mais aussi de pertes difficiles à deviner au second tour après après les défaites du premier tour.

Nous appliquons la même méthodologie utilisée dans le post compagnon, et dans les précédents Économie de Liberty Street postes ici et ici, basé sur les travaux de Greenwood, Landier et Thesmar (2015). Le tableau ci-dessous montre l’impact sur les banques des ventes hypothétiques de premier et de second tour suite aux pertes supposées pour chaque type d’institution. Les troisième à cinquième colonnes présentent les effets de premier tour exprimés, respectivement, par la perte en dollars sur le bilan global des banques, la perte en pourcentage des fonds propres globaux des banques et le classement de chaque type d’institution IFNB en termes des pertes des banques. Les sociétés financières et les compagnies d’assurance-vie créent le plus de pertes bancaires de premier tour, suivies des fonds communs de placement (obligations), des fonds spéculatifs et des fonds de pension. Comme dans Greenwood, Landier et Thesmar (2015), l’importance d’une institution pour les banques (leur « systématisme ») dépend de plusieurs facteurs : la taille (le nombre de dollars d’actifs qu’elle vend), l’interdépendance (si elle détient des classes d’actifs que les banques détiennent également ), et la liquidité des participations (pour un montant de vente donné, plus d’actifs illiquides auront un impact plus important sur les prix, entraînant des pertes plus importantes pour les détenteurs de ces actifs).

Pertes au premier et au deuxième tour pour les banques

Défaite au premier tour Défaite au deuxième tour
Type d’établissement Taille (milliards de dollars américains) Des milliards de dollars américains Capital bancaire (pourcentage) Rang Des milliards de dollars américains Capital bancaire (pourcentage) Rang Part au deuxième tour (pourcentage)
Banques 23 962
Assureurs IARD 2 133 -2,2 -0,12 7 -18,6 -0,97 7 89
Assureurs-vie 4 998 -21,3 -1.11 2 -45,9 -2.39 4 68
Les fonds du marché monétaire 5 208 -2,6 -0,14 6 -2,9 -0,15 dix 53
Fonds communs de placement (actions) 14 486 -1,2 -0,06 9 -60,3 -3.15 2 98
Fonds communs de placement (obligations) 5 537 -8.9 -0,46 3 -68,6 -3,58 1 89
Fonds communs de placement (hybrides) 1 840 -1 -0,05 dix -12.3 -0,64 8 93
Des fonds négociés en bourse 7 057 -1,7 -0,09 8 -43,4 -2,27 5 96
FPI hypothécaires 197 -0,3 -0,02 11 -0,4 -0,02 12 57
Courtiers-concessionnaires 1 827 -0,2 -0,01 12 -1.5 -0,08 11 86
Sociétés de financement 1 182 -22,3 -1.16 1 -10.3 -0,54 9 32
Fonds spéculatifs 2 210 -4.6 -0,24 4 -23,6 -1,23 6 84
Les fonds de pension 7 993 -3.3 -0,17 5 -52,8 -2,75 3 94
Sources : Calculs des auteurs à partir des données de Financial Accounts of the United States et de l’Investment Company Institute.

Pour la première série de pertes liées à la vente de feu, ce qui importe est de savoir si une institution détient des classes d’actifs que les banques détiennent également. Si nous incluons les réactions d’autres institutions, il importe également de savoir si une institution détient des classes d’actifs détenues par des institutions qui détiennent des classes d’actifs que les banques détiennent également. Pour examiner ces effets dérivés, nous simulons un deuxième tour de vente intempestive dans notre cadre, où nous considérons maintenant les pertes subies par chaque type d’institution pour chacune des ventes incendiaires du premier tour, et les ventes incendiaires du second tour qui en résultent. La seconde moitié du tableau ci-dessus montre l’impact sur les banques de l’agrégation des ventes d’incendie de second tour. Les fonds communs de placement (obligations) sont les mieux classés comme vecteurs d’amplification des chocs. Dans notre cadre, les obligations d’entreprises sont la classe d’actifs la plus largement détenue et, par conséquent, une braderie concentrée sur les obligations a un important effet de second tour. Du deuxième au quatrième rang sont désormais occupés les fonds communs de placement (actions), les fonds de pension et encore une fois les compagnies d’assurance-vie. Outre leur taille et la nature de leurs avoirs, la diversification des assureurs-vie se traduit par une forte connectivité. De même, en raison d’un manque de connectivité, le classement des sociétés financières passe de la première à la neuvième. Bien que leurs ventes de prêts puissent nuire directement aux banques, en raison de la concentration de leur portefeuille, elles sont moins susceptibles de nuire aux autres et, par conséquent, les ventes intempestives induites supplémentaires sont relativement moins graves.

Enfin, la dernière colonne du tableau ci-dessus montre le « multiplicateur de réseau », défini comme le rapport de la perte du deuxième tour sur la perte totale (du premier plus du deuxième tour). Le ratio par construction varie entre 0 et 100 %. Les estimations assez importantes de la coupe transversale suggèrent donc que si nous nous concentrons uniquement sur l’effet direct de bradage d’un segment NBFI donné sur les banques, nous manquons une composante importante et potentiellement dominante de l’effet total.

Derniers mots

Nous avons documenté les vulnérabilités potentielles des institutions bancaires aux ventes intempestives initiées dans le secteur NBFI en tenant compte à la fois des retombées directes (ventes incendiaires d’actifs également détenus par des banques) et des retombées indirectes de « second tour » (ventes incendiaires qui induisent de nouvelles ventes par d’autres IFNB qui, à leur tour, nuisent aux banques). Notre analyse met en lumière le réseau complexe d’expositions aux retombées dans le système financier américain et identifie un classement des priorités de surveillance dans les segments NBFI. Notre cadre soutient ainsi la création de nouveaux outils de surveillance.

Photo: portrait de Nicola Cetorelli

Nicola Cetorelli est responsable des études sur les institutions financières non bancaires au sein du groupe de recherche et de statistiques de la Federal Reserve Bank de New York.

Mattia Landoni est économiste financier senior à la Federal Reserve Bank de Boston.

Lina Lu est économiste financière senior à la Federal Reserve Bank de Boston.

Comment citer cet article :
Nicola Cetorelli, Mattia Landoni et Lina Lu, « Monitoring Banks’ Exposure to Nonbanks: The Network of Interconnections Matters », Federal Reserve Bank of New York Économie de Liberty Street18 avril 2023, https://libertystreeteconomics.newyorkfed.org/2023/04/monitoring-banks-exposure-to-nonbanks-the-network-of-interconnections-matters/.


Clause de non-responsabilité
Les opinions exprimées dans cet article sont celles des auteurs et ne reflètent pas nécessairement la position de la Federal Reserve Bank de New York ou du Federal Reserve System. Toute erreur ou omission relève de la responsabilité des auteurs.

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