La sanction Khashoggi – WSJ

Des amis du journaliste saoudien assassiné Jamal Khashoggi tiennent des affiches portant sa photo devant le consulat d’Arabie saoudite à Istanbul, le 2 octobre 2020.


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ozan kose / Agence France-Presse / Getty Images

La publication par l’administration Biden vendredi d’un rapport confidentiel sur le meurtre du journaliste saoudien Jamal Khashoggi en 2018 est moralement satisfaisante. La question de savoir si cela sert les intérêts américains ou même les droits de l’homme à long terme est une autre question.

Le rapport, remis au Congrès sous une forme déclassifiée, met carrément la responsabilité du prince héritier Mohammed ben Salmane pour avoir ordonné l’enlèvement et le meurtre de Khashoggi. Le rapport n’offre pas de preuve directe de la commande; il fonde le jugement sur le contrôle du prince héritier sur la prise de décision dans le Royaume et sur l’implication d’un conseiller clé et des membres de son service de sécurité personnel.

La nouvelle du rapport classifié a été divulguée à l’époque, en partie pour embarrasser Donald Trump. L’ancien président considérait le prince héritier connu sous le nom de MBS comme un allié et ne voulait pas compromettre les relations saoudo-américaines. Il a accepté le déni de MBS sans nuance ni condamnation morale, ce qui était son habitude. Le président Biden rétrograde ces liens, ou ce qu’il appelle un «recalibrage», qui jouera bien à Capitol Hill avec les progressistes et isolationnistes qui veulent éloigner les États-Unis des Saoudiens.

Le secrétaire d’État Antony Blinken a également annoncé vendredi ce qu’il a appelé une «interdiction de Khashoggi», une nouvelle politique de restriction des visas pour les personnes qui «auraient été directement engagées dans des activités contre-dissidentes extraterritoriales graves». Les États-Unis appliqueront la nouvelle interdiction à 76 Saoudiens, et cela pourrait être utile pour avertir les responsables étrangers qu’ils pourraient, eux et leurs familles, être exclus des États-Unis s’ils agissent contre des opposants à l’étranger. Ne sous-estimez pas le nombre de dirigeants étrangers qui souhaitent envoyer leurs enfants à Stanford ou à Duke.

Mais notez que les États-Unis n’ont pas appliqué cette sanction à MBS, qui est le ministre saoudien de la Défense et probablement le prochain roi. Les démocrates et les médias qualifient déjà cela d’insuffisant et veulent que MBS soit interdit sinon inculpé. L’administration Biden semble comprendre que cela conduirait à une rupture plus sérieuse des relations américano-saoudiennes qui aiderait les adversaires à Téhéran, Moscou et Pékin.

M. Trump avait une oreille éthique morale, mais son soutien aux Saoudiens et à Israël, et son opposition aux ambitions nucléaires de l’Iran, ont contribué à ouvrir la voie aux accords historiques d’Abraham entre Israël et les États arabes. L’administration Biden devrait réfléchir à deux fois avant de s’aliéner les Saoudiens, qui sont de rares amis américains dans une région dangereuse du monde.

Le meurtre de Khashoggi était une attaque particulièrement brutale contre un opposant politique, mais nous pouvons penser à d’autres qui pourraient figurer sur la nouvelle liste «d’interdiction». Si MBS se qualifie, qu’en est-il de la coterie du Kremlin de Vladimir Poutine et des membres du Conseil d’État chinois responsables en dernier ressort de l’arrestation des démocrates à Hong Kong? Ou les sponsors du terrorisme à Téhéran que M. Biden semble vouloir courtiser (voir à proximité)?

Le rapport Khashoggi et les sanctions envoient un message de dégoût des États-Unis pour un crime horrible. Mais dans un monde méchant et brutal, les États-Unis ont encore besoin de partenaires comme les Saoudiens.

Paul Gigot interroge l’ancien responsable de la sécurité nationale de Trump, Matthew Pottinger. Photo: Presse ZUMA

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Paru dans l’édition imprimée du 27 février 2021.

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