tous les regards sont tournés vers la France et l'Allemagne

tous les regards sont tournés vers la France et l'Allemagne

Les résultats des élections européennes de la semaine dernière ont été mitigés. Le Parti populaire européen et les sociaux-démocrates, traditionnellement les plus grands partis d'Europe, ont conservé leurs première et deuxième positions respectives au Parlement européen. Pendant ce temps, Renew Europe (le parti des libéraux) et les Verts ont tous deux enregistré des pertes substantielles. Le groupe d’extrême droite Identité et Démocratie a remporté 9 sièges par rapport aux élections européennes de 2019, mais cela est très loin de changer la donne. Il y a 53 nouveaux membres élus qui n’ont pas encore déclaré quel groupe (le cas échéant) ils souhaiteraient rejoindre, et d’autres changements pourraient se produire entre d’autres groupes plus petits. Dans l’ensemble, il y a eu un léger glissement vers la droite, mais la vision du Parlement européen n’a pas changé de manière significative.

Même si la crainte d'une progression significative de l'extrême droite au sein de l'Union européenne ne s'est pas concrétisée, le paysage politique de l'UE a néanmoins changé en raison des événements survenus en Allemagne et en France.

En Allemagne, le parti de centre-gauche des sociaux-démocrates (SDP) d'Olaf Scholz a perdu lourdement, arrivant en troisième position derrière les chrétiens-démocrates (CDU/CSU) et l'Alternative pour l'Allemagne (AfD) d'extrême droite. Ce vote pourrait témoigner d'un manque de confiance de l'électorat dans le SDP de Scholz et pourrait sérieusement affaiblir le gouvernement pour le reste de son mandat. Dans le contexte de l’UE, le gouvernement actuel sera incapable de défendre des positions à moins qu’elles ne soient larges et non partisanes. Ce que nous montrent surtout ces résultats électoraux, c’est que 35 ans après la réunification, l’Allemagne fonctionne toujours comme s’il s’agissait de deux pays différents. L’Ouest a voté pour la CDU/CSU et l’Est a voté pour l’AfD d’extrême droite. L’incapacité à parvenir à une cohésion interne, malgré des politiques volontaristes, n’est pas un signe encourageant pour la cohésion européenne.

La décision du président Emmanuel Macron d'organiser des élections anticipées en France constitue le véritable choc au lendemain des élections européennes. Après que sa coalition soit arrivée deuxième, avec moins de la moitié des voix du parti d'extrême droite français, le Rassemblement National (RN), la France organisera désormais des élections législatives nationales à la fin de ce mois.

Ce qui est en jeu?

La victoire de l’extrême droite RN pourrait très bien se répéter début juillet. Le leader du RN, Jordan Bardella, deviendrait le plus jeune Premier ministre français (à 28 ans), le mettant ainsi en cohabitation avec le président Macron. Le président Macron pourrait alors choisir de démissionner, ne voulant pas cogouverner avec l’extrême droite, ou bien il pourrait rester en cohabitation. Ce qu’il faudra surveiller, ce seront les agences de notation. Les obligations souveraines françaises ont connu une dégradation il y a quelques jours en raison de la dette budgétaire. Les agences de notation tenteront d'imposer de la discipline à la France, ce qui fera réfléchir tout dirigeant qui estime avoir la liberté de dépenser sur la base d'un vote populaire.

Pourquoi le président Macron a-t-il pris ce pari ?

Avec le résultat des élections européennes en France (32% pour le RN contre 15% pour la coalition Macron), la confiance dans la coalition gouvernementale est sérieusement compromise. Mais pourquoi convoquer si rapidement des élections législatives ? Le pari ici est que davantage de gens viendront voter et, choqués par la perspective d’un Premier ministre d’extrême droite, voteront de manière plus « prudente ». Une chose est sûre ; Le président Macron est désespéré et dans cette partie de poker, il a jeté toutes les cartes sur table. L'attaque est désormais sa meilleure défense.

Où cela mène-t-il l’UE ?

Malgré le résultat plus ou moins stable du Parlement européen, ces élections démontrent une fois de plus qu’il n’existe pas d’histoire unique dans l’UE. Les élections se disputent, se gagnent ou se perdent sur des questions nationales qui peuvent, en fin de compte, faire dévier l’UE de son cap.

Si le président Macron perd son pari électoral, l’extrême droite française pourrait tenter d’affaiblir l’UE et de saper sa position mondiale au sein du bloc. L’Allemagne, dont le gouvernement a également été affaibli, ne sera peut-être pas en mesure d’unir tout le monde derrière ses positions pour lutter contre l’extrême droite. Si, en revanche, le président Macron remporte le pari, il continuera à faire pression pour façonner les positions en France et à Bruxelles.

Le résultat des élections parlementaires françaises est crucial, surtout à un moment où l’UE est susceptible de poursuivre des politiques industrielles pour faire face aux défis mondiaux venant à la fois des États-Unis et de la Chine. Ce qui n'est pas clair, c'est si ces politiques serviront les intérêts français au détriment du marché unique de l'UE et, en fin de compte, du consommateur européen.

Ce qui pourrait devenir le résultat le moins controversé des élections européennes est la reconduction d’Ursula Von der Leyen à la présidence de la Commission européenne. Avec des chiffres en sa faveur, et Paris et Berlin distraits par leurs propres problèmes internes, sa reconduction pourrait être plus certaine qu'on ne le pensait auparavant.

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