Un nouveau traité européen pour lutter contre le changement climatique

Trente ans après Maastricht, un nouveau traité est nécessaire : un traité qui engagera l’UE à relever son plus grand défi dans les décennies à venir, le changement climatique.

Cet article a été initialement publié dans Money Review et est à paraître dans El Economista.

Le traité de Maastricht, signé il y a trente ans cette année, engageait les pays de l’Union européenne à faire le plus grand pas d’intégration qu’ils aient fait jusqu’à présent. Elle instaure la citoyenneté européenne, la libre circulation des personnes, des capitaux et des biens et met en marche l’Union économique et monétaire.

Trente ans plus tard, un nouveau traité est nécessaire : un traité qui engagera l’UE à relever son plus grand défi dans les décennies à venir, le changement climatique.

L’UE prend d’énormes mesures pour faire face aux émissions liées au réchauffement climatique. Mais le bilan de la réalisation des objectifs climatiques n’est pas bon. Les réformes profondes et prolongées qu’implique une transition vers le zéro émission nette nécessitent un engagement qui ne peut venir que d’un nouveau traité : un renouvellement des aspirations et des actions d’accompagnement qui répondra à quatre défis :

Ce qui est vert et ce qui ne l’est pas

La soi-disant taxonomie de l’UE vise à orienter les capitaux privés vers des activités économiques durables sur le plan environnemental. Il a de vastes objectifs environnementaux qui couvrent l’atténuation et l’adaptation au changement climatique, ainsi que l’économie circulaire, la préservation des ressources hydriques et marines, la prévention de la pollution et la protection des écosystèmes.

La taxonomie doit identifier ce qui est vraiment vert et donc cohérent avec les objectifs climatiques, tout en étant pragmatique quant à la durée de la transition vers le zéro net et les arbitrages qui auront un impact sur les trente prochaines années. Il est difficile de trouver cet équilibre sur un horizon aussi long et la menace de s’écarter des accords est bien réelle.

Nettoyer la consommation de l’UE autant que la production de l’UE

Si l’UE a fait des progrès significatifs dans l’assainissement de sa production, on ne peut pas en dire autant de sa consommation. Cela signifie que l’UE a peut-être, dans une certaine mesure, « verdi » ce qu’elle produit sur son territoire, mais qu’elle a externalisé la production de biens moins propres vers des pays extérieurs à son territoire.

Reconnaissant cela, l’UE propose un mécanisme d’ajustement carbone aux frontières, une taxe aux frontières pour les importations qui ne respectent pas les normes d’émission de l’UE.

Il sera difficile de le faire dans un système multilatéral mondial de moins en moins fiable et de le faire en tenant suffisamment compte des pays à faible revenu qui pourraient être touchés de manière disproportionnée.

Assurer uneinvestissement ambitieux et soutenu

Au cours de la prochaine décennie, l’UE devra investir entre 0,5 % et 1 % du PIB par an en plus de ce qui est déjà engagé. Quelle que soit la précision de ces estimations, il est clair que les besoins d’investissement de l’UE sont énormes compte tenu de l’énormité de la tâche. La Facilité pour la reprise et la résilience (RRF) fournit une aide suffisante aux pays pour les six prochaines années.

Mais les règles budgétaires actuelles, établies avec le traité de Maastricht, devront également être réformées pour soutenir les importants investissements nécessaires.

Une approche avancée est une règle d’or verte, qui exemptera les investissements verts des contraintes budgétaires européennes. Mais cela pourrait inciter les pays à se livrer à l’écoblanchiment : exagérer ce qui est vert pour contourner les règles. Une alternative pourrait être un fonds d’investissement européen pour le climat (semblable à la composante prêt du RRF), qui peut réduire la possibilité d’écoblanchiment, mais ne redistribue pas et n’aide donc pas à résoudre les problèmes d’héritage de la dette.

Actuellement, 14 pays de l’UE ont des dettes supérieures à la limite de 60 % fixée par le traité de Maastricht, et sept ont des dettes supérieures à 100 %. Permettre aux pays d’emprunter pour investir, que ce soit par le biais d’une règle d’or ou d’un fonds, ne répond pas à la question de savoir si les pays peuvent emprunter pour le faire sans faire dérailler leur situation budgétaire.

De plus, la nécessaire expansion budgétaire pandémique doit être suivie d’une consolidation et ce sont les investissements qui seront les premiers à en pâtir, mettant en péril la transition verte. Pour que tous les pays avancent à une vitesse minimale acceptable par tous et cohérente avec des objectifs climatiques très ambitieux, l’investissement ne doit pas être compromis.

Un ensemble de règles budgétaires mal conçu à une époque où le rôle de la politique budgétaire était très différent n’est plus adapté à son objectif. En plus de réformer cet ensemble de règles obsolètes, l’UE doit engager des fonds pour verdir l’économie.

Veiller à ce que cela soit fait de manière juste et équitable

Le fardeau de l’ajustement vers une nouvelle économie plus propre et plus verte aura inévitablement des conséquences distributives. Le mécanisme pour une transition juste de la Commission européenne, un fonds de 19,2 milliards d’euros, vise à faire face aux effets sociaux et économiques de la transition. Mais un engagement financier, aussi utile soit-il, n’est pas la même chose qu’une promesse de s’occuper de ceux qui sont laissés pour compte par la poursuite d’objectifs climatiques.

Il est incohérent d’affirmer que le changement climatique représente une urgence sans l’engagement institutionnel approprié pour le combattre, ce qui ne peut venir qu’avec un nouveau traité. L’UE ne peut plus invoquer les difficultés politiques d’un accord sur les modifications du traité et espérer soutenir les objectifs d’un Green Deal européen.


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