La crise du logement au Canada ne cesse de s’aggraver.
Le dernier rapport sur l’offre de logements de la Société canadienne d’hypothèques et de logement conclut que le niveau de nouvelles constructions est trop faible pour combler le déficit à long terme de l’offre de logements.
Mettre fin à la pénurie de logements a suscité de nombreuses propositions, allant de la libération d’espaces verts au rezonage. Mais le chemin le plus direct passe par les nouvelles constructions.
L’offre de logements n’a augmenté que de 1% au premier semestre de cette année, selon le rapport de l’agence du logement. Si l’on exclut la construction d’appartements à Toronto et à Vancouver, les mises en chantier ont diminué dans la majeure partie du pays. Les projets prennent également plus de temps à se réaliser.
Et il y a peu de signes de soulagement. L’écart entre l’offre et la demande devrait atteindre 3,5 millions de logements d’ici 2030, soit près de 20 % de l’offre totale, selon l’agence du logement.
Combler cet écart a suscité de nombreuses propositions, allant de la libération d’espaces verts au rezonage de zones limitées aux maisons unifamiliales.
Mais le chemin le plus direct passe par les nouvelles constructions.
En termes simples, le Canada doit faciliter la construction de maisons de toutes sortes. Cela peut être réalisé en réformant la réglementation du logement, notamment en assouplissant les lois sur le zonage et en rationalisant le processus d’approbation.
Ces changements permettraient de construire suffisamment de logements sans avoir recours à des terres protégées comme la Ceinture de verdure – une proposition qui a été faite mais qui a été engloutie dans la controverse.
Un problème classique d’offre et de demande
La crise actuelle a pris des années. La demande de logements au Canada a augmenté de façon constante au cours de la dernière décennie en raison de la hausse des revenus et des faibles taux d’intérêt, mais elle a explosé au cours des deux dernières années à mesure que la population a augmenté.
La croissance démographique du Canada, actuellement de 2,9 % par an, se classe au premier rang des pays du G7 et parmi les 20 premiers pays au monde. La quasi-totalité de cette croissance, soit 98 %, provient de l’immigration ; le reste provient de la population actuelle du Canada. De plus, il y a plus de 2 millions de résidents non permanents au Canada, soit le double du nombre d’il y a seulement deux ans.
Apprenez-en davantage sur les perspectives de RSM Canada sur le logement et le marché intermédiaire.
L’afflux de nouveaux résidents a entraîné une augmentation de la demande de logements, qui à son tour s’est aggravée à mesure que les millennials et la génération Z forment leur propre foyer et veulent avoir leur propre logement.
Mais à l’exception du bref pic de construction en 2021 et au début de l’année dernière, lorsque les taux hypothécaires étaient historiquement bas, la construction résidentielle stagne depuis 2008.
Après que la Banque du Canada a commencé à augmenter les taux d’intérêt l’année dernière, les permis de construire, les mises en chantier et les achèvements de logements ont chuté et sont restés stables alors que la population augmentait.
Les permis de construire s’élevaient à 11,7 milliards de dollars en juillet, soit peu de changement par rapport au milieu de 2021. De même, les mises en chantier au troisième trimestre se sont élevées à 254 000, soit un niveau comparable à celui de 2021.
Lorsque la demande augmente et que l’offre reste stable, les prix montent en flèche. Bien que les prix de l’immobilier se soient un peu refroidis, les taux d’intérêt élevés dissuadant les acheteurs, ils restent 25 % supérieurs à ceux d’août 2019, avant la pandémie.
Le marché locatif est encore pire, car les nouveaux immigrants et les jeunes louent souvent avant d’acheter, et les prix des logements deviennent de plus en plus hors de portée. Les loyers ont augmenté cette année de 9,6 % par an après avoir augmenté de 12 % l’an dernier.
Le goulot d’étranglement de l’approvisionnement
Cette hausse des loyers soulève la question de l’offre. Il va sans dire que des prix plus élevés inciteraient les promoteurs à construire davantage pour répondre à la demande. Mais cela n’a pas été le cas cette fois-ci, pour plusieurs raisons.
- Géographie: La première est la contrainte géographique dans plusieurs grandes villes. Par exemple, Vancouver est nichée entre l’océan Pacifique et les montagnes, tandis que Montréal est une île. À l’extérieur de Toronto, la Ceinture de verdure et ses 2 millions d’acres de nature sauvage et de fermes ont connu un développement limité depuis sa création en 2005.
- Coût: La deuxième contrainte est l’inflation élevée et les taux d’intérêt élevés qui, combinés à des conditions de prêt strictes, rendent l’emprunt difficile. Bien que le gouvernement fédéral ait récemment supprimé la taxe fédérale sur les produits et services sur les nouveaux projets de logements locatifs construits à cet effet, il est peu probable que cette décision suffise à annuler l’impact des taux élevés.
- Régulation: La troisième contrainte est la réglementation. C’est la seule contrainte qui, si elle était résolue, conduirait à une amélioration structurelle et durable de l’offre de logements. Plus précisément, des délais d’approbation longs et des lois de zonage et des réglementations restrictives en matière d’utilisation des terres peuvent freiner le développement.
L’énigme de la bureaucratie
Les lois de zonage empêchent la construction de logements à plus forte densité dans les zones urbaines où la demande est forte, et les restrictions d’utilisation des sols empêchent la construction de logements. Ces restrictions sont visibles dans les zones zonées à usage commercial, alors même que le besoin d’espaces commerciaux diminue et que la demande de logements résidentiels augmente. Ainsi, le nombre de logements susceptibles d’être construits est dès le départ limité par la conception.
Ensuite, il y a le long processus d’approbation qui est truffé de formalités administratives. Selon la Banque mondiale, il faut au Canada un délai incroyable de 249 jours pour obtenir les approbations et les permis de construire pour construire un entrepôt sans changement de zonage. Comparez cela aux 81 jours aux États-Unis et aux 121 jours en Australie, et il n’est pas étonnant que les développeurs canadiens soient si lents à répondre à la demande.
En partie à cause de la relative facilité des approbations dans de nombreuses régions des États-Unis, les prix des logements et les revenus ont été plus synchronisés, tandis que les coûts du logement absorbent une part toujours croissante des revenus au Canada.
Comment la réforme de la réglementation pourrait aider
L’assouplissement des lois de zonage et la rationalisation du processus d’approbation pourraient permettre aux promoteurs de construire plus, plus rapidement et pour moins cher.
Avec des lois de zonage plus assouplies, les promoteurs pourraient construire là où ils n’auraient peut-être pas été autorisés, comme dans les zones actuellement zonées à usage commercial.
À Toronto, la ville qui connaît l’une des pires pénuries de logements, 70 % des terrains sont zonés pour l’habitation unifamiliale. L’assouplissement des restrictions de densité, telles que le zonage unifamilial et les exigences minimales en matière de taille de lot, ouvrirait de nombreuses opportunités pour accroître l’offre.
En outre, les logements à plus forte densité, comme les petites maisons, les jumelés et les maisons en rangée, ont tendance à être moins chers à construire, non seulement parce qu’ils sont plus petits, mais aussi parce qu’ils nécessitent moins de ressources.
Permettre aux promoteurs de construire plus facilement se traduit par une offre plus élevée, ce qui atténue les pénuries et fait baisser les prix.
La réforme de la réglementation permet aux promoteurs de construire plus rapidement. Il faut plus de neuf mois aux promoteurs pour obtenir l’approbation et les permis de construire pour de nombreux immeubles d’habitation en Ontario. En Colombie-Britannique, le processus peut prendre jusqu’à deux ans.
Plus les processus d’approbation et d’autorisation sont longs, plus il faut de temps pour livrer les unités sur le marché, ce qui exacerbe le problème d’approvisionnement.
Aux États-Unis, en revanche, la rationalisation des processus d’autorisation pour la construction résidentielle dans des villes comme Houston et Atlanta et la réduction des réglementations de zonage ont permis de maintenir le logement relativement abordable malgré la croissance démographique. Dans certaines villes, les prix des loyers ont même baissé.
Au Canada, un bon exemple est Edmonton, la ville où les règles sont les plus simples pour construire de nouvelles maisons. L’offre à Edmonton a pu mieux répondre à la demande et les prix sont restés maîtrisés.
L’attente entraîne des coûts importants, notamment des coûts d’opportunité, des taxes sur les terrains vacants, des frais de remboursement des prêts, des taux d’intérêt croissants et des coûts de main-d’œuvre et de matériaux. Ces coûts sont ensuite répercutés sur les acheteurs et les locataires. Il y a ensuite les coûts liés à l’obtention des approbations, y compris les coûts liés à la réalisation des tests et des réunions et au remplissage des demandes. La rationalisation du processus permettrait d’économiser du temps et de l’argent et encouragerait l’offre.
Les plats à emporter
La solution à long terme la plus viable à la crise du logement au Canada est d’augmenter l’offre. Cela nécessite d’assouplir les lois de zonage et de rationaliser le processus d’approbation. Certes, de nombreuses réglementations et codes du bâtiment existent pour garantir la sécurité et améliorer les normes environnementales. Mais il est essentiel de faciliter la construction pour les promoteurs – sans pour autant supprimer les réglementations et les codes sensés – pour résoudre la grave pénurie de logements au Canada. Le Canada n’a pas seulement besoin de logements plus abordables ; il a besoin de plus de logements pour que les logements deviennent abordables.